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3 Être chez soi… ailleurs ?

  • Photo du rédacteur: Clement Clasquin
    Clement Clasquin
  • 16 févr. 2019
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 8 oct. 2020

Le 18/11/2018

20 :50

Base de Port aux Français (PAF) / Golf du Morbihan / Archipel de Kerguelen / Terres Australes et Antarctiques françaises


Depuis mon arrivée sur la base, j’ai eu quelques problèmes de mails, ce qui explique le caractère tardif de cette newsletter. Il faut dire aussi qu’ici, lorsque le bateau est là, c’est l’effervescence ! Je viens d’apprendre une joyeuse nouvelle, il y a quelques minutes… La naissance de ma filleule Lucia !! Je suis très ému et tellement content. Bravo aux parents! Être parrain, c’est fou, et dans ce contexte là, encore plus. C’est aussi un tantinet frustrant, je dois l’admettre car je ne pourrai pas serrer la petite dans mes bras avant un moment…

Voilà quelques nouvelles de mon installation sur base mais avant, quelques images que je n’ai pas pu vous envoyer avec la précédente newsletter (je mets du temps à trier tout ça, déjà près de 1000 photos !)


Premiers manchots royaux... Les détails de leurs plumages sont très beaux.


La proximité avec les animaux est grisante. Ils n’ont pas peur de l’homme. Cela dit, il ne faut pas non plus chercher à les toucher ou à les approcher de trop prêt car il y a toujours un dérangement

La manchotière est énorme. Le bruit, l’odeur qui y règnent sont surprenants.

Un bébé éléphant de mer (bonbon) tout mignon.

Un bébé de grand albatros il fait déjà bien 40cm du bec au croupion

Un magnifique damier du cap

Damier du cap au large de Kerguelen

Cormoran de Kerguelen

Albatros fuligineux à dos clair (mon préféré)


Arrivée à Kerguelen :

Cela faisait déjà deux jours que nous naviguions, le petit train-train quotidien reprenait sur le Marion Dufresne… Lever 5h30 ou 6h, un petit tour sur le pont pour se rafraîchir et tenter de voir un cétacé ou un oiseau. A 7h, petit-déjeuner, puis un petit tour sur le pont suivi d’une bonne séance de boulot. La matinée s’achève sur une formation, puis, à 11h, le repas de midi. Une nouvelle formation, du boulot, un tour sur le pont, déjà 18h et le repas du soir puis le traditionnel babyfoot avec l’équipage (avec la houle, on peut faire des supers lobs ^^). La journée se finit au bar avec les collègues, souvent pas très tard car la houle ça fatigue (on passe la journée à compenser le roulis et le tangage, c’est du sport) . Un matin, la gueule encore enfarinée, je me lève, enfile non sans mal sous-vêtements techniques, polaire, doudoune, gore tex, et me rend sur le pont. Je tombe alors nez à nez avec cette côte austère… Un patchwork de gris, brun, vert et blanc. Je manque de me faire renverser par une bourrasque de vent glacial… Température de l’eau : 3°C, température de l’air : 2°C, vent moyen 30 nœuds (environ 60kmh)…

… KERGUELEN.


L'arche de Kerguelen

60 nœuds de vent…

Photo souvenir.


La première vue que nous aurons de l’archipel, est l’emblématique arche de Kerguelen. En effet, cette OP3 (Opération Portuaire N°3 : Il s’agit de la 3 ième rotation de l’année pour le Marion Dufresne) est très spéciale puisque nous accueillons à bord 2 personnes de l’UNESCO qui ont pour mission d’accepter ou non les Terres Australes et Antarctiques Françaises au patrimoine mondial de l’UNESCO. C’est donc l’occasion de passer par tous les sites les plus emblématiques des australes et nous en profiterons largement ! Le directeur de la Réserve Naturelle des Terres Australes Françaises (mon patron) est aussi sur cette rotation. Ce premier contact avec Kerguelen, c’est un peu la première droite que tu te prends à la boxe, ton premier piment, ton premier col en vélo : ça fait d’abord mal. Le vent, le froid, la fatigue, les moyens de communication très très réduits… Mais en même temps c’est une vague d’émotions car tout ici nous rappelle à quel point nous sommes chanceux de fouler cette terre. Quelle sensation incroyable de pouvoir mettre un pied dans l’écran de télé, dans le magazine qu’on lit depuis tout petit, dans les récits d’aventures d’explorateurs. On est là, acteur de sa vie, un peu cameraman, un peu écrivain. Un vol d’une minute en hélicoptère, un saut de puce entre le bateau au mouillage et la terre ferme nous propulse sur la DZ (Drop Zone : la zone ou l’hélico se pose pour débarquer les passagers). Là, nous attendent une quarantaine de personnes, le sourire aux lèvres. Beaucoup de barbus, des vêtements parfois déchirés… Mais un accueil incroyable. Il faut bien comprendre que ces gens ont vécu presque 12 mois, complètement isolés, dont 6 de manière stricte (aucun ravitaillement) et que c’est aujourd’hui plus de 40 personnes supplémentaires qui débarquent par hélico sur leur île, dans leur base, dans leur salle à manger … Imaginez que l’on fasse pareil chez vous ! Malgré cela, l’ambiance fût très bonne dès le début, bien qu’un peu poussive, fatigue oblige.


Embarquement et trajet en hélicoptère.


La base :

Port Aux Français est la capitale des TAAF. La base est grande et fonctionne comme un petit village : tout le monde se connaît. En revanche, à la différence d’un village, moyennant 4 ravitaillements par an, la base est autosuffisante. Ça veut dire qu’elle produit sa propre électricité, sa propre eau. Les stocks de nourriture permettent au cuistot de préparer à manger pour tout le monde et au pâteux (boulanger en jargon TAAF)de préparer pains et viennoiseries. Ici, on a accès à tout et tout le monde met la main à la pâte pour aider à faire la vaisselle, trier les poubelles ou faire le ménage dans les espaces communs. Parmi ces lieux, il y a ici un cinéma (CinéKer), une cantine (TiKer), un bar (Totoche), une bibliothèque (dont j’ai oublié le nom, grand lecteur que je suis). On peut ajouter à la liste des lieux importants, le garage auto le moins cher du monde (Kerauto) où le service est gratuit, Kerfour qui est le magasin de nourriture de l’IPEV, MeteoKer, Kerpoub, l’EDK (Electricité De Kerguelen) et j’en passe. On trouve aussi un Abris Côtier (l’abricotier), une salle de sport, un gymnase, qui fait aussi entrepôt (avec un mur d’escalade), et le fameux BCR (Bureau des Communications Radio) dont je vais vous reparler. Ce bureau fait aussi office de bureau de poste et de boutique touristique.



La base de PAF du nord au sud, en descendant vers le golf.

En pivotant à 90° vers la droite on aperçoit la grande maison au bout de la route. Il s’agit de la « Résidence ». Il s’agit de la mairie, le poste de police, l’armurerie… Bref c’est la maison du chef du district (le DisKer). Il est le seul représentant de l’état sur la base.

On continue a descendre et on regarde à gauche....

On regarde en face...


L’isolement :


TOTAL est l’adjectif qui me vient à l’esprit mais ce n’est pas tout à fait juste. Nos liens avec l’extérieur sont les suivants :

  1. Le bateau : principalement le Marion Dufresne en avril OP1, en aout OP2, en novembre OP3 (celle avec laquelle je suis arrivé) et fin décembre OP4. Il existe une OP0 entre OP4 et OP1 mais il s’agit d’une campagne océanographique du bateau. Il passe donc sans courrier et sans ravitaillement pour la base. Il sert juste à rapatrier les hommes.

  2. Le satellite : débit max : 1ko/s… c’est très peu. Pour vous donner une idée, il m’est impossible de charger une page internet ordinaire. Je ne peux pas aller sur ma page gmail, il me faut passer par la boite de Kerguelen. Le satellite sert aussi pour les communications téléphoniques. Là ça marche mieux mais c’est très cher (60ct la minute il me semble).

  3. Les quelques bateaux de pêche et de la Marine Nationale qui passent par là.


Ça veut dire pas de portable, pas Facebook, pas WhatsApp... Bref pas de communication à distance, on perd plein de vielles habitudes. Sur base, les seules communications électroniques vraiment très utilisées sont les VHF, on les appelle les zézettes. Dès qu’on se trouve à l’extérieure de la base, il faut la prendre et l’on est tenu à une vacation radio à 17h30 et une veille entre 8h et 8h30 et entre 12h et 12h30. Le maître du jeu est le responsable BCR qui se trouve dans le bâtiment dont je vous ai parlé plus haut. Il répond à tout le monde et suit nos déplacements sur une carte. Il organise une opération de sauvetage automatiquement après 24h sans nouvelle.

L’isolement, ça veut aussi dire pas d’hôpital. Ici il y a deux médecins qui ont eu des formations de chirurgie et de dentisterie mais certaines blessures bénignes en métropole peuvent être très graves à Kerguelen. Nous avons tous reçu une formation de premiers secours et allons la compléter par une formation plus intensive. Il faut apprendre à modifier son rapport au risque et à le revoir à la baisse.


Mes premières escapades en cabane étaient pour accompagner les touristes qui viennent lors de l’op. On fait quasiment tous les trajets en hélico :D


Voilà je m’arrête car il est tard et qu’il faut que j’aille me reposer ! Bisous Austraux (un spécial pour ma filleule) !


Clément.


 
 
 

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